L'Eveil d'Héliane

Misty, le chaton noir aux yeux verts joue avec un torchon oublié sur le sol. Tani, le petit robot abîmé est en veille dans un coin.

Quant à moi, je me réveille. Cheveux emmêlés, dans mon t-shirt rouge et jogging noir, je me dirige vers la table à manger. Un vieux morceau de pain sec y traîne. Je soupire. Il va falloir que j'aille rechercher à manger, me dis-je. Pas facile de trouver de quoi se nourrir dans les décombres. La grisaille se fait voir par la fenêtre. Encore une journée terne. Dans le poêle à bois crépitent encore quelques flammes. Je n'ai dormi que cinq heure d'affilée. Pourtant il faut se mettre en route. J'engloutis le dernier morceau de pain. Je peine à mâcher... Il est déjà bien dur. Je ne m'en fais pas pour le chat, il trouvera bien du gibier. De l'eau propre et une souris ou deux lui font bien l'affaire. J'emporte avec moi ma besace, et franchis le pas de la porte. Une lumière blanche perçant subitement le brouillard m'aveugle. Je ferme les yeux par réflexe. C'est sans doute encore le phare du centre-ville qui débloque. Depuis la catastrophe il s'allume irrégulièrement de jour comme de nuit. Au bout d'une minute, la lumière s'éteint enfin. Je tente de discerner les formes autour de moi. Le brouillard semble s'être épaissi depuis hier.

Voilà déjà trois jours que c'est arrivé... Mon humeur est aussi terne que le ciel. Je me souviens de mon réveil, au sol près de mon lit, le crâne en douleur comme martelé. L'impression envahissante que rien ne sera plus jamais pareil. L'angoisse profonde qui fait sortir de coeur hors de ses gongs. M'être levée en titubant. Avoir trouvé Tani, mon petit robot ménager câbles dehors, débranché. Le chat dans un placard miaulant à la mort. La vu par la fenêtre, comme si tout s'était renversé. Puis...en sortant...l'apocalypse.

Je n'ai croisé personne depuis, j'ignore s'il en reste. Quelques oiseaux, quelques chats, des rats sortant des canalisation, pas un Homme. Il y en a sûrement, mais où? Je m'étais sentie tellement mal le premier jour, que je n'ai rien fait. Puis le second, j'ai pris mon courage à deux mains et ai gravi les escaliers en ruine de la tour du phare qui semblait encore tenir debout bien que j'eus la peur de ma vie en la sentant trembler sous mes pieds. Arrivée en haut je pouvais constater que le désastre s'étendait à perte de vue. Jusqu'où est-ce arrivé? Qu'est-il arrivé? Je suis encore sous le choc au troisième jour. Mais la nature reprend le dessus: j'ai faim. Il faut que je me nourrisse et que je me débrouille pour trouver de l'eau potable si je veux survivre. Je chercherai d'autres survivants après avoir trouvé.

Ma plus grande peur est que cela recommence. Que ce soit la fin. Et mes parents? Le village de Valdorbe a-il-été épargné? Mon angoisse refait surface et je l'étouffe tant que je peux en pensant au présent. À l'urgence du moment.